La galanterie est-elle passée de mode ? Ci-après sont moqués l’archétype du galant homme et celui du rustaud que l’on ne rencontre guère.
Le gentilhomme d’antan avait toujours de délicates attentions pour sa gente compagne. Il déposait sur sa dextre aux senteurs capiteuses ses plus tendres baisers, avec une ferveur quasi religieuse. Avec lui, ce n’était pas un baisemain, mais un baisement.
Le butor d’à présent ne doute pas que cette main tant convoitée finira, un jour ou l’autre, sur le coin de sa figure. Aura-t-il gardé souvenance des fragrances de naguère, quand sa joue, encore douloureuse, fleurera bon le produit dont se sert Madame pour récurer les lieux d’aisances souillés par la miction incontrôlée de Monsieur ? Mais à qui sera la faute ? Pourquoi affirmer sa virilité, au sortir d’un repas bien arrosé, en urinant loin de la cuvette et souvent à côté ? De nos jours, avec un ordinateur et le logiciel idoine, il est aisé de simuler une pluie diluvienne sans encourir les foudres de Madame.
Le gentilhomme d’antan gravissait et descendait les degrés d’un immeuble en précédant une dame. En montant, il revêtait la livrée du galant homme soucieux de préserver la pudicité d’une femme en s’abstenant de jeter un œil malicieux sous sa jupe ; en descendant, il était bien aise d’être en situation d’intervenir prestement si la Belle en venait à chanceler.
Dans les escaliers d’un immeuble, le butor d’à présent reste toujours en arrière d’une belle inconnue. Dans la montée, il ne se prive pas de l’extatique vision d’une Vénus callipyge qui ondule des hanches aux épaules ; dans la descente, il espère secrètement que la Belle se laissera choir pour avoir une occasion de parvenir à ses fins en faisant fi des préliminaires. Malgré tout, il imagine que, dans trois ou quatre lustres, cette culotte qui sied si bien à la jeune femme lui tiendra lieu de string.
Le gentilhomme d’antan faisait montre d’une grande diligence pour ouvrir les portes à sa bien-aimée, en quête d’un sourire pour toute récompense.
Le butor d’à présent ne se fait aucune illusion sur la gent féminine : toutes les portes ouvertes n’empêcheront pas un galant homme de trouver porte close, au sortir de son travail, un soir pluvieux d’automne ; en bref, on ouvre la porte à sa compagne en maintes occasions, et un beau jour, ou plutôt, un soir pluvieux d’automne, on la prend.
Le gentilhomme d’antan aidait sa compagne à passer son manteau.
Le butor d’à présent n’aide pas sa compagne à se vêtir, mais sa promptitude à la dévêtir laisse pantois. En son for intérieur, il sait bien que plus tard, il aidera sa compagne à mettre son manteau, non par civilité, mais pour se préserver de spectacles affligeants.
D’un autre coté, la dame d’antan prenait moins de douches !
Par ailleurs, le gentilhomme d’alors était moins regardant.